Prépapier : l'explosif rapport de la CIA sur la torture
Fruit de trois ans d'enquête, il fait la lumière sur
le programme secret utilisé pour interroger des militants présumés al-Qaida et
donne des détails sur la simulation de noyade ou la privation de sommeil. Les
républicains sont vent debout.
On ne connaît
pas encore les détails, mais craignant qu’ils suscitent une flambée de
sentiments anti-américains, Washington a déjà mis en place mesures de sécurité
renforcée autour de ses bases et de ses ambassades. Attendue depuis huit mois, la
synthèse parlementaire sur les méthodes de torture de la CIA
après les attentats du 11-septembre 2001 va être mise en ligne mardi. Le texte
sera accompagné des remarques critiques de la CIA et des républicains, hostiles
à une publication.
Le rapport, qui décrit les méthodes
utilisée par la CIA pour interroger les militants présumés d’al-Qaida dans le
cadre du programme "Rendition, Detention and Interrogation" autorisé
par l’administration Bush, a été rédigé par la commission du Renseignement du
Sénat. Originalement bi-partisane, les républicains se sont rapidement
désolidarisés de l’initiative. Le texte de 500 pages a été approuvé à huis clos
en décembre 2012. Le princvipe de sa publication accepté en en avril dernier.
Cette synthèse est une version expurgée et censurée d’une évaluation de 6.000
pages qui a demandé plus de trois ans d’enquête entre 2009 et 2012.
D‘après les sources ayant eu le rapport
entre les mains, celui-ci décrirait en détails la mort de détenus lors
d’interrogatoire et les mesures d’intimidation prises pour les faire parler. Le
cerveau de l’attentat contre le porte-avion USS Cole, Abdel Rahman al Nashiri,
a ainsiété nargué avec une perceuse électrique. Si la perceuse n’a jamais été
employée sur lui, cette figure
d’al-Qaida a été soumise au bruit de l’engin. Un autre détenu a été menacé
d’abus sexuels, ses geôliers lui mettant un balai sous le nez.
Le texte devrait aussi lever le voile sur
le recours aux gifles, au froid, aux simulations de noyade et à la privation de
sommeil. Si cette dernière tactique
était autorisée, elle a parfois été poussée au-delà du raisonnable. Un
Palestinien a été interrogé sans discontinuer et empêché de dormir pendant cinq
jours. Face à ce type de débordements, la pratique a été plus fermement
encadrée à partir de 2003. Plusieurs détenus ont aussi été soumis à des
simulacres d’exécution ce que n’avaient jamais validé les experts juridiques de
l’administration Bush.
« Grande
hypocrisie des politiques »
Bilan ravageur, le rapport estimerait que
ces interrogatoires musclés n’ont pas permis obtenir des informations
pertinentes, notamment pour retrouver la trace d’Oussama Bern Laden, qui vivait
caché au Pakistan, et que la CIA aurait sciemment menti au Congrès sur
l’étendue et l’efficacité de la torture.
Les conclusions
du rapport sont "choquantes", avait prévenu Dianne Feinstein,
présidente démocrate de la commission, au printemps dernier. Elle évoquait
« de terribles erreurs" tandis que Barack Obama regrettait « des techniques que
toute personne honnête devrait considérer comme de la torture ».
« Nous avons franchi une ligne », déplorait-il. C’est à la
Maison-Blanche et à Dianne Feinstein que l’on doit la publication du
document, transparence qui a mis vent debout les républicains.
"Nous
avons la chance d'avoir des hommes et des femmes qui travaillent dur à la CIA, ce sont des patriotes", a défendu
l’ancien président George W. Bush qui regrette un rapport "hors
sujet". Son vice-président Dick Cheney, qui a toujours défendu la CIA a
juré que « si c’était refaire, il ne changerait rien. « Je ne crois
pas que la CIA ait déformé la réalité. Il ne faut pas oublier que notre
objectif était d’éviter un nouveau 11-Septembre », assure-t-il.
Le président républicain
de la commission du Renseignement de la Chambre des représentants, a jugé que
publier ce rapport était "une très mauvaise idée". "Nos services
ont estimé que cela allait entraîner des violences et des morts", a-t-il
mis en garde. La crainte semble même avoir été partagée par une partie de l’administration
Obama : le secrétaire d’Etat John Kerry a en vain plaidé auprès de Dianne
Feinstein pour qu’elle change d’avis
Dans une
tribune publiée en fin de semaine dernière dans le Washinston Post, Jose
Rodriguez, ancien responsable de ce programme au sein de la CIA, a pour sa part dénoncé la "grande
hypocrisie" des politiques sur ce dossier. "Nous avons fait ce qui nous a été
demandé. Nous savons que cela a été efficace", a-t-il plaidé. "Une
décennie plus tard, en guise de récompense nous entendons certains de ces mêmes
politiques faire part de leur indignation et - pire - déformer les faits et
minimiser les succès obtenus".
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