Une histoire de roseaux
Anne Brunel : Chronologiquement, c'est le premier papier exécuté pour ce cours de radio. mais l'ayant rapatrié tardivement sur mon disque dur, je viens seulement de le retrouver. Le premier mercredi du second semestre, nous avons été invités à Chartres pour voir le juge Laurence Vichniesky en action, ainsi que "visiter" la prison de cette ville (une visite, un peu froid dans le dos, qui donne une idée des conditions de vie des détenus et qui aide à comprendre pas mal de choses), et enfin assister à une audience du tribunal d'instance. A cet occasion, Anne Brunel nous a demandé de lui présenter quelque chose pour le cours suivant et comme je trouve les audiences judiciaires très intéréssantes (malheureusement toute ont une qualité dramatique très théâtrale) j'avais choisi, l'exercice du compte rendu sur cette affaire ubuesque.
Ce n’est ni l’affaire Elf, ni le procès d’Outreau, c’est une audience civile comme il y en a chaque jour dans les tribunaux d’instance français. Affaire Guilly contre les entreprises Telnon fils et Fauvel. L’affaire se plaidait mercredi dernier à Chartres L’objet du litige ? un toit de chaume jamais achevé et des bottes de roseaux défectueuses. Peu de choses vu de l’extérieur mais beaucoup pour les intéréssés.
A en croire le défenseur de Monsieur Guilly le cas semble entendu et les torts du maître d’œuvre indéniables. Interruptions régulières et inexpliquées des travaux fin 2001 puis simple abandon en janvier, lettres recommandées demandant la reprise du chantier restées sans suite. Dégâts et désordres irréversibles du bâtiment suite à l’exposition aux intempéries. Livraison de roseaux de qualités inégales et d’origines différentes Intervention en urgence et à grands frais d’une deuxième entreprise pour terminer le toit. De quoi justifier plus de 12.000€ de dommages et intérêts.
Oui mais si on en croit les avocats de la défense, la vérité est ailleurs. Le travail de la société Telnon a été semé d’embûches : retards pris par les autres artisans, intervention d’une entreprise extérieure à la demande du client qui a en réalité interdit de chantier son premier fournisseur. Et preuve que même les causes simples inspirent de grandes envolées. L’avocat de Fauvel, fournisseur des roseaux se lance dans un enthousiaste plaidoyer à la première personne « Je ne suis qu’un producteur de roseaux et je ne comprends pas ce que je viens faire ici ». Pour lui, il ne serait être question de malfaçon des roseaux. « On ne peut reprocher à Dame Nature de créer des roseaux de différentes tailles et couleurs». S’ensuit une leçon sur la taille des toits de chaume comparée à la coupe rasoir des coiffeurs. De quoi méditer jusqu’au jugement qui sera rendu 18 mai prochain
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