Tuesday, November 05, 2013

Frédéric II, le roi philosophe

Le magazine « Secrets d'histoire » retrace le parcours torturé du souverain qui fit de la Prusse l'une des grandes nations européennes.

Il est resté dans les mémoires sous le nom de Frédéric le Grand. C'est un souverain au sens du devoir irréprochable et à la vie de tourments, que fait sortir de l'ombre « Secrets d'histoire » ce mardi soir. Symbole du despote éclairé des Lumières, Frédéric II de Prusse fut un esthète, un amateur des arts, un compositeur et un joueur de flûte traversière talentueux. Mais également un stratège et un combattant redoutable qui fit entrer son pays, au XVIIIe siècle, dans le cercle des grandes nations européennes.
Un visage à la Janus que les historiens allemands et français réunis par Stéphane Bern expliquent par une enfance malheureuse. Fils tant attendu après deux héritiers morts en bas âge, il est élevé à la dure et sans pitié par son père Frédéric-Guillaume. Ce « roi-sergent » qui ne vit que pour son armée et la chasse ne peut comprendre le goût pour la musique et les livres de son héritier. Pour couper court à ces penchants qu'il juge « efféminés », Frédéric-Guillaume multiplie les brimades physiques et astreint son fils à un programme épuisant de 5 heures à 22 heures.
Une enfance martyre, dépeinte de manière incroyablement réaliste par le magazine historique de France 2 à coup d'extraits de films. Surveillé en permanence, le prince prend, à 18 ans, une décision lourde de conséquences. Avec son confident, il tente de s'enfuir vers l'Angleterre mais le projet est découvert. Frédéric et Hans Hermann von Katte sont emprisonnés et accusés de haute trahison. Comble de sadisme, Frédéric-Guillaume oblige son fils à assister à la décapitation de son seul ami, et peut-être amant. Toute sa vie durant, Frédéric II fuira les femmes et s'entourera de fidèles soldats. Des amitiés qui nourrissent de son vivant des rumeurs sur son homosexualité. Hypothèse que la plupart des intervenants de « Secrets d'histoire » estiment plausible.
L'exécution de Katte a endurci le prince. Lorsqu'il monte sur le trône en 1740, il défie les attentes. Celui qui avait écrit un essai politique intitulé L'Anti-Machiavel se révèle un chef de guerre assoiffé de conquêtes militaires, qui paye de sa personne sur le champ de bataille. Il s'empare de la Silésie qui appartient à l'Autriche, alors en pleine crise de succession.
Déstabilisées, les cours européennes revoient en profondeur leurs alliances, la France abandonne la Prusse et se range au côté de Vienne et de Moscou. Voulant garantir ses victoires, Frédéric II attaque de nouveau l'Autriche en 1756, déclenchant la guerre de Sept Ans. Le conflit laisse la Prusse exsangue mais reconnaît son extension territoriale. Frédéric II aura réussi à en doubler l'étendue et la population.

Dans la langue de Molière

En parcourant les jardins et salles raffinés du palais de Sans-Souci à Potsdam et du château de Charlottenbourg à Berlin, Stéphane Bern insiste aussi sur le Frédéric II protecteur des arts et ambassadeur du style baroque et rococo. Francophile convaincu, Frédéric II ne s'exprime et n'écrit que dans la langue de Molière. Admirateur de Voltaire, le souverain l'invite à sa cour. Entre les deux hommes, plus de 800 lettres seront échangées. Leur correspondance continuera malgré leur brouille car entre le roi des philosophes et un philosophe roi qui gouverne en monarque absolu et ne supporte aucune remise en cause, aucun ne peut perdre la face.
L'âge et la vieillesse n'apportent pas la sérénité à Frédéric II. Il se retire du monde et règne en ermite, seulement entouré de ses chiens. Misanthrope jusqu'au bout, le roi demandera même à se faire enterrer de nuit dans son jardin à Sans-Souci.

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