Je blogge donc je suis

Chol/Kravetz/Muhlmann: Un petit article réalisé dans le cadre d'un dossier sur Davos (et en plus la fée inspiration-je-te-trouve-une-idée de papier s'était penchée sur mon berceau!) qui a confirmé mon intérêt pour les blogs. Je n'oublierai jamais comment j'envoyai un mail de demande d'interview à Loïc Le Meur à 22h57 et qu'il me répondit à 23h, quel homme et accro au net ! Le portrait part un peu dans tous les sens car trop long mais je fus surprise de voir qu'Eric Chol l'apprécia en dépit de cette faute. Ou comment conclure qui fut mouvementé et angoissant agréablement!

JE BLOGGE DONC JE SUIS : LOIC LE MEUR, L’HOMME QUI A BLOGGE DAVOS

Tout le monde connaissait Davos. Personne, jusqu’ici ne connaissait Loïc Le Meur. Pourtant cet ancien élève d’HEC, aujourd’hui âgé de 31 ans, est à l’origine d’une petite révolution au sommet, jusqu’alors particulièrement fermé, qui réunit chaque année les grands de la planète économique. Pour la première fois, Davos va faire l’objet d’un blog officiel et Loïc Le Meur est chargé de le tenir avec l’aide d’une quinzaine de contributeurs, tous participants dûment inscrits au forum. Au-delà de cette consécration, c’est, pour son créateur, le rôle du blog , nouvel outil internet révolutionnant l’art de communiquer qui est mis en évidence. « Nous entrons dans un monde ou chaque citoyen peut participer au débat et apporter sa pierre à l’édifice. » se réjouit-il.

L’histoire d’amour entre Loïc Le Meur et les blogs commence en 2002, lorsqu’il rencontre l’entrepreneur japonais Joichi Ito, autre accro de l’internet et du blogging. « Au cours de notre discussion, il m’a fait réaliser à quel point le blog incarnait le rêve démocratique que nous avions eu au commencement d’internet. ». Loïc Le Meur se lance sans compter dans cette aventure. Il revend ses starts-ups spécialisées dans l’hébergement et la publication de sites web pour les petites entreprises. Il fonde en 2003 U Blog et devient vice-président de Six Apart, deux compagnies expertes dans la construction de blogs pour entreprises et particuliers.

Davos croise le chemin des blogs en janvier 2004 quand l’homme d’affaires français, par ailleurs animateur d’une session intitulée « blogs et journalisme », décide de consigner son séjour à Davos sur ce journal de bord virtuel. Résumés des réunions, réflexions personnelles déplorant parfois l’étroitesse d’esprit , la peur de participants plus âgés vis à vis des défis d’internet (propriété intellectuelle, téléchargement illicite, e démocratie) fleurissent. Cela fait déjà deux ans qu’il est devenu un pratiquant invétéré, passant régulièrement plus de quatre heures par jour à lire les blogs de ses amis et mettre à jour le sien[1] !

Loïc Le Meur se fait d’abord sermonner par les organisateurs de Davos surpris de cette initiative isolée. « A Davos tout est très compartimenté. Vous avez d’une part les participants, les media fellows et enfin les journalistes qui n’ont pas le droit d’assister à tous les débats. Au début, ils ont eu très peur de cette perte de contrôle et puis j’ai discuté avec eux et ils ont compris tout ce qu’ils avaient à y gagner en terme de transparence et de rapprochement avec les citoyens ordinaires ». Pour cet amateur de sports extrêmes, il y a en effet urgence à sortir des salles exiguës de Davos. « Nos commentaires permettent aux internautes de savoir ce qui se passe à Davos. En sollicitant leurs contributions, nous les invitons à prendre part à nos discussions, nous démocratisons Davos. »

Les responsables du forum sont alors convaincus et autorisent un premier essai en avril 2004 lors d’un sommet régional à Varsovie. Loïc Le Meur se charge de sa mise en place[2]. De nombreux sujets très critiques vis à vis des grandes puissances et de la communauté internationale y seront abordés : inefficacité des politiques de luttes contre le SIDA en Chine et Inde, absence d’une politique étrangère commune de l’Union Européenne... Devant le succès de cette initiative qui va concentrer 10% du trafic du site officiel du forum économique, il est alors décidé de pérenniser l’expérience et de l’étendre à la manifestation phare : le sommet de Davos.

Mais pour Loïc Le Meur, le bouleversement ne s’arrête pas là. Il ne s’agit pas seulement de rendre Davos plus accessible mais aussi de rendre la parole aux simples citoyens. Le blog ouvre la voix à la démocratisation de l’information et du journalisme. Il est persuadé que le blogging va purger la presse de ses « mauvais gratte-papiers » qui écrivent sans vérifier ou aller sur le terrain. « Un blog permet à chacun d’entre nous de devenir journaliste et le tsunami en Asie a montré combien ces « nouveaux » acteurs étaient plus renseignés que les professionnels des médias qui ont eu recourt à leurs photos, films ».

Ne craint-il pas que l’adoption par le forum économique mondial du blog mette en danger l’impertinence de ton qui prévalait ? «Non, nos lecteurs le remarqueraient trop vite et se détourneraient encore plus méfiants » Et si jamais un pareil détournement se produisait ? « Il me restera mon blog personnel où je continuerai à écrire! ». Pour l’instant, Loïc Le Meur est un homme « surbooké » qui n’a pas plus de 10 minutes d’interview à accorder. Il doit préparer sa conférence pour le sommet Davos de 2005 « Welcome to blogopolis », tout en tenant le blog officiel. Mais cet homme pressé est désormais reconnu. Il a été désigné par ses pairs « Young global leader of tomorrow », titre récompensant les jeunes entrepreneurs de moins de 40 ans jouant un rôle significatif dans l’économie mondiale.

Signes 4700

[1] http://www.loiclemeur.com/france
[2] http://www.forumblog.org/blog/