Canal+ et les droits du foot: Canal+ remporte une bataille mais pas la guerre
Catherine Vincent : article d'actualité en temps limité (2h) avec une petite brochure faîte d'articles et de dépèches... Gros moment de panique lorsque du coin de l'oeil on voit qu'une horloge tourne aussi vite! Rien d'extraordinaire mais pas la grande catastrophe non plus (j'ai même réussi à finir dans les temps!). Un article de quotidien basique!
Depuis samedi 12 décembre Canal+semble avoir pris l’avantage sur son rival de toujours TPS. Avec une offre de 600 millions d’euros par an sur trois ans, le groupe Canal+ s’est adjugé l’exclusivité des droits de retransmission du championnat de la ligue. C’est la première fois depuis 1999 que Canal+ retrouve le monopole de diffusion des matchs de la ligue. Une bonne nouvelle à priori, l’amateur de foot désireux d’avoir accès à l’intégralité des matchs n’aura plus à s’abonner à Canal Satellite et à TPS, il pourra souscrire directement au premier. Canal+ devrait donc récupérer de nouveaux abonnées.
En vérité c’est pour le groupe Canal+, une victoire à la Pyrrhus. De l’avis de professionnels du football ou de l’audiovisuel comme Etienne Mougeotte, vic-président de TF1, l'exclusivité accordée à Canal+ l'a été à "un prix totalement déraisonnable". Un chiffre inflationniste par rapport aux droits de retransmissions actuels : 305 millions d’euros pour Canal+ et 70 millions pour TPS.
Cependant dans cet affrontement entre les deux bouquets satellitaires, Canal+ avait beaucoup plus à perdre que TPS et ne pouvait se permettre de rater le coche.
Le profil des abonnés a profondément évolué. Si autrefois la prospérité de Canal+ reposait sur les fans de football, les cinéphiles et les amateurs du film pornographique du samedi, la concurrence sur ses deux derniers marchés s’est faite beaucoup plus rude depuis l’entrée en scène de TPS. Conserver les droits de retransmission du championnat de la ligue était indispensable quand 23% des abonnés le sont exclusivement pour le football.
Mais, cette exclusivité a un coût. Pour rentabiliser cet investissement Canal+ devra trouver, selon des experts financiers entre 600.000 à 800.000 abonnés supplémentaires. Un objectif peu réalisable estime Charles de Mortemart, expert chez Dexia. Au mieux Canal + pourrait remporter 150.000 abonnés et autant pour Canal Satellite soit 350.000. Le président du groupe Canal+, Bertrand Méheut, se veut plus rassurant et pense que cette acquisition permettra de rallier à la chaîne crypté un public plus large. Néanmoins prudent, cette dépense va entraîner des ajustements. Le tarif des abonnements va augmenter de 1,1 euro par mois. D’aucuns s’inquiètent des conséquences de cette victoire sur un autre secteur pilier de la chaîne : le cinéma. Payer le prix fort sur le foot implique une moindre marge de manœuvre sur ce domaine. Si Canal+ maintiendra se engagements envers le cinéma français et européen « il sera difficile pour Canal + d'investir ailleurs » concède Bertrand Méheut. De fait, le football coûtera 11€ par mois et par abonné à Canal+ contre2.40€ pour le cinéma.
Cette fragilité financière bénéficie à TPS pour qui cette défaite est une petite victoire. Le bouquet ne perdrait que de 100.000 à 300.000 abonnés mais, contrairement à Canal+, cela ne remet pas en cause sa survie.« L’argent économisé », permet à TPS de se consacrer à d’autres projets et espérer lorgner encore davantage sur les terres de Canal+. TPS fait, en effet, le pari de développer les sports mineurs. TF1 a obtenu l’exclusivité des droits de retransmission des coupes du monde de rugby 2007 et 2011. TPS peut aussi espérer souffler à Canal+ la diffusion des championnats italiens et espagnols qui seront remis en compétition en 2005. D’autres atouts sont dans sa main : l'exclusivité du championnat anglais à partir de 2005 et la diffusion de films de production américaine, jugés financièrement plus intéressants.
Pour autant, le groupe Canal+ n’est pas démuni ni exempt d’arrière-pensées. Si TPS, privée de droits du football, souffrait d’un manque à gagner important, Canal+ serait alors en position de force pour imposer son projet de fusion entre les deux bouquets satellitaires. En attendant le round suivant, les véritables vainqueurs seront les clubs de football français qui se partageront la somme rondelette de 1,8 milliard d’euros.